En présentant mon dernier livre, “Je ne mangerai plus de cerises en hiver”, j’ai souvent dit qu’il ne constituait pas une petite annonce de recherche d’emploi. Je lis pourtant, ici ou là, que je préparerais mon retour au gouvernement. Alors, soyons clair: ce n’est pas mon intention.
D’abord, j’ai toujours trouvé qu’il était un peu indécent de se porter candidat à de telles fonctions. L’initiative de choisir ses ministres appartient au seul Président de la République.
Ensuite, je me suis engagé, vis à vis des Bordelais, à exercer pleinement la fonction de maire qu’ils m’ont confiée. Or, il y a, à mes yeux, incompatibilité entre cette fonction et un poste ministériel. On ne peut pas tout faire à la fois.
Mais, me dira-t-on, vous avez affirmé que vous étiez disponible pour servir. Je le confirme. Il y a bien des façons de servir ses concitoyens et son pays.
J’ai conscience de le faire en proposant aux Bordelais de continuer à construire ensemble une ville belle à vivre. C’est l’objectif de l’agenda 21, du projet social et du projet urbain que nous sommes en train de mettre en oeuvre pour qu’à l’horizon 2030 Bordeaux soit une métropole européenne à part entière, et une métropole à taille humaine où le “vivre ensemble” soit une réalité pour tous. La tâche est exaltante.
Je suis plus que jamais passionné par les grands enjeux nationaux et internationaux. Comment agir à ce niveau?
En premier lieu, par la parole, qui est souvent une arme en politique. Quand j’en sens le besoin, j’exprime et continuerai à exprimer mon point de vue, en espérant qu’il peut contribuer au débat public.
Ensuite par le travail. Tout gouvernement, par la force des choses, a peu ou prou le nez dans le guidon. Les urgences du court terme l’y contraignent, j’en ai fait moi-même l’expérience. Il a besoin d’être accompagné dans la préparation de l’avenir. Ce devrait être le rôle des partis politiques. C’est aussi celui des clubs ou cercles de réflexion dont la liberté d’esprit peut être plus grande. J’ai l’intention de ré-activer, dans les mois qui viennent, mon cercle de travail en lui proposant deux thèmes de recherche prioritaires:
- Première question: comment faire aimer l’Europe aux Français et plus généralement aux Européens? Nous vivons une situation paradoxale: d’un côté, nous avons conscience que, dans un monde évidemment multipolaire, la meilleure façon de défendre nos intérêts et notre modèle de civilisation, c’est de le faire ensemble plutôt qu’isolément. Et pourtant, l’Union Européenne est mal aimée ou laisse indifférent. La difficulté à lancer la campagne européenne à moins de deux mois du jour du scrutin en apporte une nouvelle démonstration. La raison n’en est-elle pas que les Français, plus encore que nos voisins, ne voient pas clairement le chemin que leur trace l’Union? Il est nécessaire, me semble-t-il, de leur proposer un nouveau rêve européen. Premier chantier.
- Deuxième question: après la crise , car nous sortirons de la crise, allons-nous recommencer comme avant? Ou serons-nous capable d’inventer un nouveau modèle de développement, d’accomplir la révolution écologique sans laquelle la poursuite du réchauffement climatique nous conduirait au pire? Comment nous déplacer autrement? Comment construire et habiter autrement? Comment consommer autrement et gaspiller moins? Comment produire autrement en économisant les ressources rares? Comment mettre les technologies numériques de l’information et de la communication au service du développement durable et d’un nouveau “projet de civilisation”? Bref comment vivre autrement, plus sobrement, ce qui ne veut pas dire moins joyeusement? Immense chantier, passionnant chantier qui nous invite à penser et agir du local au global, des agenda 21 locaux jusqu’à la prochaine grande négociation mondiale à Copenhague en décembre de cette année, en passant par la mise en oeuvre effective des bonnes intentions de notre Grenelle de l’environnement et l’implication accrue de l’Union européenne, par exemple dans une politique commune de l’énergie.
Nous avons besoin d’hommes et de femmes d’expérience, de savoir et surtout d’enthousiasme pour approfondir ces questions et proposer des plans d’action. Beaucoup y travaillent déjà. Mais il y a du boulot pour tout le monde…"